Lettre à Alex (n°7)
Tu te souviens qu’à l’anniversaire de Bébert, ça a bien chauffé avec les camarades ?
Bon, alors comme on s’est dit que les affreux patrons, ils allaient adorer nos divisions et s’en servir pour rabaisser encore un peu plus les prolétaires devenus incapables de se défendre, on a décidé d’aller voir Bob pour le raisonner un peu. Parce que je peux te dire qu’il nous a choqué, avec ses réflexions « crypto-capitalistes » (c’est encore une trouvaille de Bébert et faut dire que ça impressionne).
Bébert, justement, il a déclaré que Bob, il lui faisait pas peur et qu’il était prêt à aller discuter calmement avec lui, et même à lui exploser la gu… si il comprenait pas. Gigi, qu’est pas bête (enfin, ça dépend des jours…) , elle a dit comme ça : « Faut un témoin ! Autrefois, avant la Révolution, sous Louis-Philippe, quand il y avait des duels entre les nobles parce que y en avait un qui avait regardé de travers la femme de l’autre, il y avait toujours des témoins. Là, c’est grave : il en faut un aussi !». En fait, j’ai entendu qu’elle disait à Jojo que Bébert, il était loyal, honnête et objectif mais qu’il mentait tout le temps, que c’était acceptable en réunion avec les patrons, mais que là on ne saurait jamais ce qui avait vraiment été dit, alors il fallait qu’il soit accompagné par quelqu’un.
Et c’est tombé sur qui ? Sur moi !
Alors on a bien fait les choses, Bébert et moi on a pris rendez-vous avec Bob et il a dit qu’il nous recevrait vendredi après-midi. Ca nous arrangeait pas bien parce que c’est quand même le jour du bouclage et qu’on avait prévenu personne mais Bébert il a dit que nos affaires étaient bien plus graves que le bouclage et qu’on dirait qu’on était en rendez-vous client. Gigi, elle a dit que dans ce cas-là, elle disait qu’elle avait un enfant malade. D’ailleurs, c’est la championne des jours d’enfant malade et des demi-journées de rentrée scolaire. C’est marrant, surtout quand on sait que ses gosses, ils ont plus de 18 ans tous les deux…
Avec Bob, ça a bien commencé : il a été très aimable, il a dit à Bébert qu’il s’était bien battu qu’il était digne de l’organisation, et Bébert il était tout flatté, tout tassé dans son fauteuil, tout sourire, et il me faisait des clins d’œil. Et quand Bob s’est levé pour répondre au téléphone, il m’a dit : « Tu vois, ça c’est un mec bien ; il nous en faudrait plus des comme ça ! ». Et quand Bob est rentré dans la pièce, il lui a demandé pourquoi il avait été méchant l’autre jour.
Tu te souviens qu’à l’anniversaire de Bébert, ça a bien chauffé avec les camarades ?
Bon, alors comme on s’est dit que les affreux patrons, ils allaient adorer nos divisions et s’en servir pour rabaisser encore un peu plus les prolétaires devenus incapables de se défendre, on a décidé d’aller voir Bob pour le raisonner un peu. Parce que je peux te dire qu’il nous a choqué, avec ses réflexions « crypto-capitalistes » (c’est encore une trouvaille de Bébert et faut dire que ça impressionne).
Bébert, justement, il a déclaré que Bob, il lui faisait pas peur et qu’il était prêt à aller discuter calmement avec lui, et même à lui exploser la gu… si il comprenait pas. Gigi, qu’est pas bête (enfin, ça dépend des jours…) , elle a dit comme ça : « Faut un témoin ! Autrefois, avant la Révolution, sous Louis-Philippe, quand il y avait des duels entre les nobles parce que y en avait un qui avait regardé de travers la femme de l’autre, il y avait toujours des témoins. Là, c’est grave : il en faut un aussi !». En fait, j’ai entendu qu’elle disait à Jojo que Bébert, il était loyal, honnête et objectif mais qu’il mentait tout le temps, que c’était acceptable en réunion avec les patrons, mais que là on ne saurait jamais ce qui avait vraiment été dit, alors il fallait qu’il soit accompagné par quelqu’un.
Et c’est tombé sur qui ? Sur moi !
Alors on a bien fait les choses, Bébert et moi on a pris rendez-vous avec Bob et il a dit qu’il nous recevrait vendredi après-midi. Ca nous arrangeait pas bien parce que c’est quand même le jour du bouclage et qu’on avait prévenu personne mais Bébert il a dit que nos affaires étaient bien plus graves que le bouclage et qu’on dirait qu’on était en rendez-vous client. Gigi, elle a dit que dans ce cas-là, elle disait qu’elle avait un enfant malade. D’ailleurs, c’est la championne des jours d’enfant malade et des demi-journées de rentrée scolaire. C’est marrant, surtout quand on sait que ses gosses, ils ont plus de 18 ans tous les deux…
Avec Bob, ça a bien commencé : il a été très aimable, il a dit à Bébert qu’il s’était bien battu qu’il était digne de l’organisation, et Bébert il était tout flatté, tout tassé dans son fauteuil, tout sourire, et il me faisait des clins d’œil. Et quand Bob s’est levé pour répondre au téléphone, il m’a dit : « Tu vois, ça c’est un mec bien ; il nous en faudrait plus des comme ça ! ». Et quand Bob est rentré dans la pièce, il lui a demandé pourquoi il avait été méchant l’autre jour.
Alors Bob, il a ouvert un tiroir, il a sorti ses cigarettes et il en a allumé une – alors qu’il sait bien que c’est interdit, mais c’est pour te dire que c’est un type qu’a pas peur ! – puis il nous a regardé tous les deux, il a rigolé, et il a dit :
« Vous savez, je suis pas loin de l’âge de la retraite – et je compte bien négocier pour partir avant – et j’en ai tellement vu, des patrons peureux et aveugles, des directeurs intéressés et avides (Bébert, il croyait qu’il disait « à vide » !), des camarades uniquement intéressés pas leur propre situation personnelle ou donneurs de leçons et fainéants comme des couleuvres (là, Bébert, il s’est demandé si Bob il parlait pas de Jojo ou même de lui) que je ne me fais pas beaucoup d’illusions sur les hommes.
Je ne vais pas vous parler des patrons : je sais tout le mal que vous en pensez.
Mais parmi les camarades, vous avez des incompétents, qui ne comprennent rien, veulent connaître des tas de choses sur l’entreprise mais n’en comprennent pas 2% ; vous avez des craintifs, qui sont incapables d’élever la voix quand les autres camarades déc… complètement ; il y a même des malhonnêtes qui parlent de démocratie mais menacent, physiquement parfois, ceux qui ne votent pas comme eux ; il y a encore ceux qui sont intéressés uniquement par la protection qu’ils ont, par les heures libres bien commodes pour faire les courses et aller chez le coiffeur, par les primes dès qu’il y a une réunion ; il y a ceux qui ont des comptes personnels à régler et jurent de planter la boîte pour avoir le sentiment d’exister ou pour monter dans l’organisation… ».
Alors là, Bébert et moi, on s’est levé et on a dit qu’on partait parce que c’était pas admissible de dire des choses comme çà, qui démolissent des millénaires de lutte sociale et de représentation du personnel, et que même la patronne du Medef, elle oserait jamais parler comme ça des salariés dévoués pour leurs collègues.
Bob, il nous a ouvert la porte et il nous a dit au revoir.
« Vous savez, je suis pas loin de l’âge de la retraite – et je compte bien négocier pour partir avant – et j’en ai tellement vu, des patrons peureux et aveugles, des directeurs intéressés et avides (Bébert, il croyait qu’il disait « à vide » !), des camarades uniquement intéressés pas leur propre situation personnelle ou donneurs de leçons et fainéants comme des couleuvres (là, Bébert, il s’est demandé si Bob il parlait pas de Jojo ou même de lui) que je ne me fais pas beaucoup d’illusions sur les hommes.
Je ne vais pas vous parler des patrons : je sais tout le mal que vous en pensez.
Mais parmi les camarades, vous avez des incompétents, qui ne comprennent rien, veulent connaître des tas de choses sur l’entreprise mais n’en comprennent pas 2% ; vous avez des craintifs, qui sont incapables d’élever la voix quand les autres camarades déc… complètement ; il y a même des malhonnêtes qui parlent de démocratie mais menacent, physiquement parfois, ceux qui ne votent pas comme eux ; il y a encore ceux qui sont intéressés uniquement par la protection qu’ils ont, par les heures libres bien commodes pour faire les courses et aller chez le coiffeur, par les primes dès qu’il y a une réunion ; il y a ceux qui ont des comptes personnels à régler et jurent de planter la boîte pour avoir le sentiment d’exister ou pour monter dans l’organisation… ».
Alors là, Bébert et moi, on s’est levé et on a dit qu’on partait parce que c’était pas admissible de dire des choses comme çà, qui démolissent des millénaires de lutte sociale et de représentation du personnel, et que même la patronne du Medef, elle oserait jamais parler comme ça des salariés dévoués pour leurs collègues.
Bob, il nous a ouvert la porte et il nous a dit au revoir.
Mais on sait pas pourquoi, on est resté. Peut-être parce qu’on avait envie d’entendre la suite. Alors il a repris la parole :
« Heureusement, il y a aussi des camarades honnêtes, pour qui notre combat est une vocation, parfois familiale, qui se sont formés au plan économique et social, qui savent faire la part des choses entre les grandes envolées parce qu’il faut bien penser aux prochaines élections et la marche réelle de l’entreprise. Ceux-là, je les respecte et c’est eux qui obtiennent les plus grands progrès sociaux. Mais selon toi, Bébert, il y en a combien ? »
Bébert, il a cherché dans sa tête et j’ai presque vu défiler dans sa cervelle tous les camarades. Il suait à grosses gouttes parce qu’il les plaçait comme sur une balance ou dans un détecteur de mensonge et il était obligé de juger lui-même si c’était des bons ou des mauvais éléments, mais heureusement Bob il a pas attendu la réponse et il a recommencé à parler :
« Aujourd’hui, vous vous opposez systématiquement à tout. C’est pas un dialogue social, c’est un barrage ! Les patrons disent : « On peut sauver la boîte ! » et vous répondez « Non, tout est fichu, baissez les bras !». Vous vous acharnez à dire que tous les salariés fuient, que les objectifs sont inatteignables, que c’est lamentable de devoir rendre des comptes sur son travail, qu’il fallait pas fermer les halls, que c’était mieux avant. Ah Oui ? Et vous en connaissez, des boîtes où on ne rend pas compte de ce qu’on a fait comme visites, comme chiffre d’affaires ? Vous en connaissez des crémeries (là, ça m’a rappelé quelqu’un) où le chiffre d’affaires s’effondre complètement et où on ne mobilise pas les commerciaux ? Vous pouvez me dire où elles sont aujourd’hui les boutiques où on laisse les commerciaux accorder des remises délirantes aux clients ? Et des réseaux de magasins qui survivent avec 5 clients par jour pour leur vendre des annonces à 100 Euros maxi ?
Le problème, c’est qu’aujourd’hui vous êtes coincés dans votre rôle d’opposants systématiques et que les collègues, ceux qui vous écoutent vaguement mais sans adhérer à l’organisation, ils savent que vous ne proposez rien si ce n’est le refus de TOUT ce qui est proposé par les patrons. Vous êtes devenus une caisse de résonance de tout ce qu’il y a de négatif dans l’entreprise ».
Pendant que Bob parlait, Bébert, il est passé par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel : vert, blanc, rouge, violet… Et moi j’avais envie de me mettre à pleurer.
« Heureusement, il y a aussi des camarades honnêtes, pour qui notre combat est une vocation, parfois familiale, qui se sont formés au plan économique et social, qui savent faire la part des choses entre les grandes envolées parce qu’il faut bien penser aux prochaines élections et la marche réelle de l’entreprise. Ceux-là, je les respecte et c’est eux qui obtiennent les plus grands progrès sociaux. Mais selon toi, Bébert, il y en a combien ? »
Bébert, il a cherché dans sa tête et j’ai presque vu défiler dans sa cervelle tous les camarades. Il suait à grosses gouttes parce qu’il les plaçait comme sur une balance ou dans un détecteur de mensonge et il était obligé de juger lui-même si c’était des bons ou des mauvais éléments, mais heureusement Bob il a pas attendu la réponse et il a recommencé à parler :
« Aujourd’hui, vous vous opposez systématiquement à tout. C’est pas un dialogue social, c’est un barrage ! Les patrons disent : « On peut sauver la boîte ! » et vous répondez « Non, tout est fichu, baissez les bras !». Vous vous acharnez à dire que tous les salariés fuient, que les objectifs sont inatteignables, que c’est lamentable de devoir rendre des comptes sur son travail, qu’il fallait pas fermer les halls, que c’était mieux avant. Ah Oui ? Et vous en connaissez, des boîtes où on ne rend pas compte de ce qu’on a fait comme visites, comme chiffre d’affaires ? Vous en connaissez des crémeries (là, ça m’a rappelé quelqu’un) où le chiffre d’affaires s’effondre complètement et où on ne mobilise pas les commerciaux ? Vous pouvez me dire où elles sont aujourd’hui les boutiques où on laisse les commerciaux accorder des remises délirantes aux clients ? Et des réseaux de magasins qui survivent avec 5 clients par jour pour leur vendre des annonces à 100 Euros maxi ?
Le problème, c’est qu’aujourd’hui vous êtes coincés dans votre rôle d’opposants systématiques et que les collègues, ceux qui vous écoutent vaguement mais sans adhérer à l’organisation, ils savent que vous ne proposez rien si ce n’est le refus de TOUT ce qui est proposé par les patrons. Vous êtes devenus une caisse de résonance de tout ce qu’il y a de négatif dans l’entreprise ».
Pendant que Bob parlait, Bébert, il est passé par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel : vert, blanc, rouge, violet… Et moi j’avais envie de me mettre à pleurer.
Alors Bébert, il s’est mis à crier et il faisait des grands moulinets avec ses bras, et il disait :
« Vous avez intérêt à vous mobiliser pour que le chiffre d’affaires, il reparte, parce que sinon, c’est tout le bateau qui coule ! Oh, les chefs, vous inquiétez pas pour eux : ils sont diplômés, ils ont des relations, ils retrouveront du boulot, mais les camarades ? Vous croyez vous battre contre les chefs alors que vous vous battez contre vos collègues ! Si t’avais autre chose que le sauce blanche dans le ciboulo, Bébert, tu serais le premier à dire que oui, on peut y arriver, que y a pas de raison qu’on fasse un tiers du chiffre d’affaires d’il y a deux ans, que les clients, ils arrêtent pas de faire de la pub mais qu’ils sont passés aux prospectus et qu’on peut leur faire faire le chemin en sens inverse, mais qu’ils faut retourner les voir. Parce que tu sais bien, toi Zorro, que les clients, ils disent qu’ils ne nous voient plus jamais ! Quand la boutique crachait du résultat, vous croyez qu’on ne nous demandait pas faire des comptes-rendus de visite ? Et qu’on ne devait pas avoir un sacré matelas avant de commencer la semaine ? Et que celui qui décrochait pas des nouveaux clients toutes les semaines, il se faisait pas sonner les cloches ? Vous regrettez la belle période mais vous croyez qu’elle va vous tomber dessus par miracle ? Mais il serait temps de vous bouger le c…, bon sang !
Et je peux vous dire que si vous comptez enfin dans ce combat, les patrons, ils sauront que vous êtes devenus incontournables. Et alors, vous aurez du poids pour reparler un jour d’accord d’intéressement, de formation ou de meilleure participation aux bénéfices. Mais aujourd’hui, rien !».
Là, Bébert et moi, on a eu très peur, on s’est bouché les oreilles et on s’est enfui du bureau. On a couru jusqu’à la salle de repos près des rotatives, et on s’est effondré dans un fauteuil. Il y a un bobinier qui nous a vus et qui nous demandé ce qu’on avait. Bébert, il a juste pu lui dire : « Bob, il est devenu capitaliste ! » et il est tombé dans les pommes…
Zorro
mdr! je suis que c'est à peine caricaturé...
RépondreSupprimertu vas te faire engueuler Zoro....Ca c'est sûr!
A moi aussi dans mon ancien publication , j avais Ma GiGi A prendre ses heures rentree scolaire et mercredi apres midi alors que ses rnfants ont le permis de conduire. A commander des fournitures pour leur rentree sur le compte de la société.Tu l écoutais elle aura pu refaire le monde, mais nous on l appelé l improductive. Tu sais quoi Zorro le mieux c est Qu elle est toujours la!!! Moins tu en fais mieux tu es vu..
RépondreSupprimerEt plus tu fais des heures sup non justifiées en PAO aussi !!!
RépondreSupprimerT'ES SUPER BIEN VU (fin du message).
RépondreSupprimerMoi je suis fan !!! Chacun de nous a sa Gigi, son Bob et son Bébert ... mais qui sont-ils réellement ... a suivre !!!
RépondreSupprimerEt nous notre Gigi ses rdv à la gynéco, ou chez l'esthéticienne ou le kiné et........ bien évidemment pendant les heures de boulot, même jour de bouclage cela ne la génait pas, DP et payée à rien foutre... Mais chut... Vous la connaissez peut-être ?
RépondreSupprimerben oui on la connait...c'est celle qui se plaint que le patron touche trop d'argent non? qui manifeste en entrainant les autres alors qu'elle pose des déleg pour être payée pendant les jours de grêve? ( le commun des mortels lui, il s'assoie sur sa journée lui!!!) celle qui double quasiment son salaire avec les réunions DP, CE ou ChCt payées en "prime"? Ben oui, on la (les)connait...IL s'occupe de nous sortir de la merde! quel exemple! une vraie vocation, hein?...
RépondreSupprimerC'est marrant ce blug ... je poste régulierement des critiques concernant l'ami Zoroo, parce que désolée, mais MOI, je le trouve à chier ... et comme par hasard, elles disparaissent tout le temps.
RépondreSupprimerC'est un blog libre ??? je me demande !!!!
Ah ! C'est sur qu'il dérange Zorro... Ce serait tellement bien de le faire disparaître, qu'il arrête de dire tout haut ce qu'on pense tout bas et qui dérange un peu trop...
RépondreSupprimeralors Zorro, t'es plus là ? T'as été viré ?
RépondreSupprimerZorro a négocié son silence avec la Direction, on lui a donné des primes donc il s'écrase ... Comme les autres !!
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